Paradoxalement, l’information jeunesse en milieu populaire souffre de deux fléaux antagonistes qui agissent conjointement : la sous-information et la surinformation !
Tous les deux, sous-information et surinformation, entraînent néanmoins les mêmes résultats : désinformation et absence de repères..
1. La sous-information en milieu populaire est liée à un phénomène sociologique toujours bien actuel, à savoir que : les inégalités sont déterminée par le capital culturel des individus, capital qui est directement corrélé au niveau socio-économique de ceux-ci. En ce qui concerne les classes populaires, ce capital est précaire dans la mesure où il présente un écart par rapport à la culture dominante (celle des classes moyennes et supérieures), et la maîtrise des ressources d’information fait partie de ce capital.
Exemple :
Pour illustrer cette composante, prenons le cas de l’information sur les études et l’orientation scolaire :
En effet, Infor jeunes Laeken a, depuis de longues années, une expérience de travail avec les jeunes issus des milieux populaires. Ceci dit, nous sommes également consultés, et c’est le cas en matière d’information et d’orientation scolaire, par des jeunes issus de milieux plus favorisés (classes moyennes). Cette expérience avec un public mixte, nous permet d’établir certains constats notamment en matière d’enseignement, domaine qui représente à peu près la moitié des demandes qui nous sont adressées :
a) en ce qui concerne les jeunes issus des classes moyennes, la donne est la suivante : on observe des parcours scolaires relativement linéaires (humanités générales ou techniques de transition, la plupart du temps), avec peu de bifurcations. On observe également chez ces jeunes, une capacité à verbaliser leur situation et leurs difficultés, ainsi qu’une aptitude à donner à la scolarité un sens qui va au-delà du court terme. Pour ces jeunes-là, qui sont déjà bien informés à la base, l’information prodiguée par les centres d’information jeunesse est un plus qui s’additionne à des ressources déjà en place.
b) Concernant les jeunes issus des milieux populaires, il en va généralement tout autrement. Ils peuplent en grande majorité les filières dites de relégation (autres que le général) et ont donc souvent des parcours non-linéaires (on vient du 1e degré général, puis l’on est relégué vers des options techniques, ensuite vers le professionnel, puis vers les formations en alternance (CEFA) - quand par bonheur on n’a pas encore abandonné l’école entre-temps). Leur rapport au savoir et à l’école est marqué par des croyances du type « ce n’est pas l’école, mais la vie qui m’apprendra » ou par des traits utilitaristes (gagner sa vie au plus vite, etc.). En d’autres termes leur rapport au savoir et à l’école (en particulier la formation générale) ne fait pas sens, et donc l’accès aux filières « fortes » s’en trouve d’entrée de jeu barré. Pour ces jeunes, souvent sous informés au départ, l’information prodiguée par les centres d’information jeunesse doit s’intégrer à une pédagogie plus large portant sur les enjeux qui sous-tendent l’information.
Conséquences en termes d’information jeunesse :
- Pour les jeunes « classes moyennes » : l’information sera clairement perçue comme une ressource supplémentaire, servant à construire une stratégie de choix d’école, et indirectement de choix de vie..
- Pour les jeunes de milieu populaire, l’information ne fait pas toujours directement sens, pour que ce soit le cas elle doit être prise dans un processus de sensibilisation aux enjeux qu’elle recouvre, ce qui suppose une approche beaucoup plus élaborée et proactive.
2. La surinformation, quant à elle, est liée en partie aux matraquages médiatiques en général, mais plus spécifiquement à l’INTERNET.
En effet, en dépit de la fracture numérique, la plupart des jeunes, y compris en milieu populaire, ont d’une façon ou d’une autre accès à l’internet (si ce n’est pas à la maison : dans les cybercafés, les centres d’information jeunesse..). Cet outil fabuleux permet l’accès à une infinité d’informations et cette qualité est en même temps son principal défaut : internet est constamment source de surinformation et donc de désinformation, car :
- les moteurs de recherche ne font pas de distinction entre l’information citoyenne et l’information publicitaire.
- On ne peut jamais être assuré de l’exhaustivité de l’information.
- Internet n’explique pas comment organiser et trier l’information.
- Internet ne fournit par lui-même aucun critère sur la pertinence et la fiabilité des sources.
- Internet (recherche google) ne développe pas une perspective critique sur l’information.
Exemple :
Une maman vient s’informer sur les possibilités de stages sportifs pour ses fils de 8 et dix ans durant les grandes vacances. Elle nous dit avoir déjà cherché plusieurs heures sur internet mais sans succès car les formules qu’elle a trouvées sont soit trop onéreuses soit trop éloignées du domicile familial. Les bases de données gérées par Infor Jeunes permettront de lui donner des solutions en rapport avec les critères qu’elle aura retenus (dates, localisation géographique, conditions financières, etc.).
Là où internet ne fait pas le tri entre les formules purement commerciales et les vacances à caractère pédagogique, les permanents des centres d’information jeunesse, eux, mettent en évidence des formules de vacances à la fois délassantes et épanouissantes, mais aussi porteuses d’effets pédagogiques et formateurs (stages sportifs, immersions linguistiques, ateliers créatifs, etc ..) L’information est donc sélectionnée de manière critique, encodée, gérée, en vue de servir le public (prioritairement celui qui est le moins favorisé face à l’information).
Conséquences en termes d’information jeunesse :
- Les jeunes et leurs familles ont besoin de professionnels de l’information jeunesse pour « trier » les informations en surnombre et les mettre en perspective.
- Ils ont encore toujours besoin de professionnels qui écoutent, décryptent leur demande, et leur apportent des réponses structurantes.
- Ils ont besoin de professionnels qui les aident à formuler leurs objectifs, et leur donnent des pistes pour les atteindre.